Blâmer les abstentionnistes, sacraliser la participation électorale et la sphère institutionnelle ?
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Il n’est pas rare que des gens de gauche concentrent leurs attaques contre les abstentionnistes. En refusant d’accomplir leur devoir civique, ces derniers se rendraient complices de la montée en puissance de l’extrême droite et mettraient en péril la démocratie. C’est se tromper de cible. Si l’abstention est un phénomène complexe et à multiples facettes, elle est néanmoins devenue une réalité politique incontournable, massive et structurelle, surtout dans les classes populaires. Si politiquement elle ne règle rien, elle adresse pourtant un message clair : « cela ne changera pas comme ça ». Elle est le symptôme d’un gouvernement représentatif à bout de souffle, en état de décrépitude, hors sol, qui rejoue le même scénario depuis presque 40 ans : celui de la guerre contre les classes populaires et de la défense zélée des intérêts des puissants. Face à la montée des périls réactionnaires, identitaires et autoritaires, il est donc de bon ton de culpabiliser, voire de diaboliser ceux qui choisissent le non-vote. Et la seule issue qu’on leur propose, c’est de rentrer au bercail la tête basse et de jouer les fils et les filles prodigues. C’est de consentir à user à nouveau de ce vote qui non seulement ne change pas leur vie mais de surcroit conforte une situation irrespirable pour eux. Dans certaines villes de Seine-Saint-Denis, 60% des gens se sont détournés des urnes. Ce sont des travailleurs, des chômeurs, des précaires, des jeunes : la partie de la société la plus violentée et méprisée par le système. Ces personnes ne votent plus parce que les élus (même de gauche, même officiellement très à gauche) non seulement ne se mettent plus à leur service, mais qui plus est, ont rejoint les rangs de ceux qui les maltraitent et entretiennent leur domination. Que dire à ces gens? Leur servir un discours culpabilisant? Froncer les sourcils ? Les menacer en leur disant que s'ils ne votent pas pour les notables qui construisent leurs rentes de situation sur leur dos, ils auront droit au pire? Mais ils vivent déjà le pire, tous les jours !
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