mercredi 12 juin 2013
mercredi 12 juin 2013
Par Fañch Ar Ruz, mercredi 12 juin 2013 à 00:42 :: Comme des porcs ! :: #643 :: rss
Les rubriques auxquelles vous avez (presque) échappé
p.231
Entrer en politique, si ce n’est pas un paravent pour faire mousser son égo ou jouer les « Nicolas le Jardinier » avec ses petits intérêts personnels, ça peut rapprocher du monde. Rien de plus logique, puisqu’il s’agit de sortir de soi-même pour défendre une vision de la société et tenter de faire bifurquer celle-ci dans le sens qui nous apparaît le plus pertinent. En embrassant l’engagement communiste, du monde, vous en bouffez par tous les orifices. Parce qu’il lutte contre toute les formes de domination et qu’il juge nécessaire de désosser cette société pourrie pour remettre les pièces du puzzle dans le bon ordre, l’individu communiste développera la sale manie de renifler la réalité dans ses moindres recoins. Plus ça sentira fort… et plus ça l’intéressera.
Internationaliste, il a pour horizon le monde entier. Il est donc logique qu’il soit à l’affût de tout ce qui s’agite, tremble, convulse et suppure à la surface de la planète. évidement, nous évoquons ici un idéal-type : celui du « communiste conséquent », qui, conscient de ne pas être un « surhomme », s’attelle malgré tout quotidiennement à tenir la barre de ses convictions, en paroles et en actes.
Il existe de prétendus communistes qui usent de leurs beaux habits de révolutionnaire pour briller en société et draguer des meufs. La « Révolution », c’est si romantique…
D’autres instrumentalisent le communisme pour se confectionner une bonne conscience de gauche, bien confortable, anesthésiant tous les doutes, stérilisant tout sens critique, excusant par avance toutes les compromissions : « Je suis forcément irréprochable, je suis communiste ! (à ce qui paraît…) ».
Quelles que soient leurs motivations, ceux qui en usent comme d’un vernis conventionnel sont les pires fossoyeurs de cette énergie subversive. Mais laissons tous ces névrosés patauger dans leur petite mare de caca personnel.
Vous l’aurez sans doute compris, les auteurs de ce bouquin ont la prétention d’appartenir à la catégorie des « communistes conséquents ». D’ailleurs, si ce livre vous interpelle, c’est peut-être que vous aussi, vous en êtes… même s’il ne vous était jamais venu à l’esprit de vous coller ce genre de label sur le gras du cul. Pourtant, même « le communiste conséquent », ne peut embrasser tous les aspects du réel. Il ne possède pas de superpouvoirs. Il ne fait malheureusement pas partie du club très « select » des « X-Men ». Il n’est ni omniscient, ni omnipotent. Ses engagements, même s’ils prétendent être rationnels et atteindre l’universel, sont pétris de subjectivité, façonnés par son histoire personnelle et orientés par ses affects, par ce qui le touche ou le laisse froid. Ils se cristallisent au gré de rencontres avec des causes particulières qui libèrent l’empathie, avec des individus qui accrochent la lumière d’une façon particulière, avec des lectures qui emportent, stimulent ou font douter.
Un engagement, même aussi totalisant que le communisme, s’incarne toujours dans une vie concrète, de chair, de sang, d’émotions, de choix et de contraintes. C’est une aventure vécue au ras du sol.
Depuis le début de votre lecture, vous vous baladez sur les sentiers de dix ans d’engagements, de colères, de frustrations, de doutes, de tâtonnements, qui ont tordu les entrailles des auteurs de ce bouquin. Chacun de nous deux a débroussaillé sa propre piste. Mais nos routes ont fini par se croiser, pour se mélanger et se fondre en un chemin plus vaste, plus râpeux, à la fois concordant et dissonant. Les ruades et les coups de poings dans la gueule distribués si généreusement au fil de toutes ces pages sont les répliques sismiques des combats que nous avons partagé et parfois livré ensemble au cours des années 2000, même si chacun de nous a toujours gardé sa manière bien particulière de mollarder.
D’autres échos du monde ont chatouillé nos oreilles, d’autres saloperies nous ont mis en rogne, mais, omnibulés par les bastons qui nous ont happé, nous n’avons pas pu foncer la tête la première dans l’œil du cyclone de ces autres empoignades, non moins cruciales. Il aurait été hypocrite de notre part d’écrire des tartines et de pondre 150 dessins sur ces sujets à peine déflorés. Mais nous avons tenu, en esquissant ce petit tour d’horizon « des rubriques auxquelles vous avez (presque) échappé », à rendre hommage à ces pans de la réalité qui auraient pu nous absorber.
Une dernière chose : ne vous étonnez pas si au fil de votre lecture, ça part en sucette. Les deux camarades qui ont pondu ce livre ont toujours refait le monde cernés par une armée de bouteilles plus menaçantes et redoutables les unes que les autres. Alors, tentons une expérience. Fermez les yeux…détendez vous. Il fait nuit. Vous êtes bien. Votre verre se remplit sans discontinuer, comme par enchantement. Les meubles vous sourient. La conversation n’a aucun sens… mais vous êtes persuadé de dire des choses cruciales pour l’avenir de l’humanité. à votre réveil… un pivert dans la tête… vous constatez que le capitalisme n’a pas été renversé pendant la nuit… dommage. Il faudra recommencer.
Texte : Munin
Dessins : Fañch Ar Ruz
Sous licence creative commons BY-NC-ND
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